LE PLAISIR, C’EST QUOI DOCTEUR ?

Leplaisir2Fantasme de puissance, plaisir suprême ou résultat d’une technique de « bon coup » bien huilée… l’orgasme a fait couler à peu près autant d’encre que de larmes. Les hommes considèrent celui des femmes comme le fondement de leur virilité, les femmes le simulent régulièrement pour ne pas heurter leur susceptibilité. Ou parce qu’elles craignent de passer pour frigides… En bref, il empoisonne la vie autant qu’il peut l’embellir. Alors l’orgasme, un cri du cœur ou l’Arlésienne de l’amour ?

 

paroledefemmesorgasmesAlors chérie, heureuse ?

« Je connais l’orgasme clitoridien, mais pas l’orgasme vaginal. C’est vrai que je l’attends comme le couronnement d’une sexualité épanouie et que j’ai tendance à changer régulièrement de partenaire dans l’espoir de le découvrir. Je ne peux m’empêcher de reprocher inconsciemment aux hommes que je connais de ne pas m’offrir ce plaisir dont on m’a tant parlé ». M. a vingt-sept ans et désespère visiblement de devenir une « vraie » femme. A tort ou à raison, elle éprouve une frustration permanente qui l’éloigne insidieusement de ses amants. Une frustration qui la fait s’étioler et se demander si, par hasard, elle ne serait pas tout bêtement anormale. Ce sentiment d’exclusion, peut-être même d’attardement physique, induit des incidences psychologiques désastreuses. On lui aura tellement rebattu les oreilles de cet orgasme vaginal qui fait voir des étoiles, dérober le sol sous son corps pour parvenir au septième ciel dans un tremblement de terre d’apocalypse qu’elle en vient à mépriser son amant pour cause d’inefficience. Lui, après s’être escrimé le plus longtemps possible (en pensant à sa feuille d’impôts) sans aucun résultat, aura peut-être une dernière gentillesse manuelle pour qu’elle ne soit pas trop frustrée. Encore faudra-t-il qu’il ait eu la délicatesse d’y penser.

Triste tableau d’un acte d’amour qui oblige les trois quarts des femmes à jouer des tyroliennes au plus fort de l’action… alors que le cœur n’y est pas. Pourquoi simulent-elles ? Parfois par amour, souvent par crainte de décevoir ou par tendresse. Aussi, afin de s’éviter des scènes interminables, préfèrent-elles acquiescer d’un sourire angélique et timide à la sempiternelle question : « alors chérie, heureuse ? » Et on peut les comprendre. Le mâle blessé dans son orgueil est le plus chicaneur et pénible des bipèdes existant sur cette terre. Plutôt le conforter dans ses illusions de Roi de la jungle à qui rien ne résiste que de l’entendre grincer des dents ou de le voir bouder comme un môme. Rasséréné et bouffi d’un orgueil usurpé, il pourra se rendre au café du commerce gloser sur ces exploits de « bon coup » patenté. Au moins, tant qu’il n’est pas là, la salle de bains offre une multitude de plaisirs compensateurs. 

 

Je connais l’orgasme clitoridien, mais pas l’orgasme vaginal. C’est vrai que je l’attends comme le couronnement d’une sexualité épanouie et que j’ai tendance à changer régulièrement de partenaire dans l’espoir de le découvrir…

 

frustrationfemininesLes lois du corps

Traditionnellement, on a convenu de différencier les deux plaisirs, respectivement clitoridien et vaginal, dans les termes suivants. Le premier est comparable à celui de l’homme, il met fin à une tension croissant en fonction de l’excitation des caresses. S’enchevêtrent dans la montée du plaisir des sensations de bonheur et d’angoisse. Le sommeil vient immédiatement après le relâchement complet des muscles. Le second, le fameux orgasme vaginal, n’est pas à proprement parler un orgasme. Le docteur Zwang le décrit comme une sensation analogue « à celle que ressentirait une personne atteinte d’eczéma qui se gratte ». L’image n’a peut-être pas le romantisme auquel on aurait pu s’attendre, mais elle reflète parfaitement la « non-résolution » du plaisir vaginal.

Ce plaisir vague et diffus qui ne peut s’épanouir que dans un total abandon, d’intensité variable et jamais achevé. La phase dite de plateau, flottement que certains n’hésitent pas à comparer à l’effet d’opiacés, peut intervenir dès les premières minutes de la pénétration. Nous ne le répéterons pas assez, le plaisir vaginal ne peut pas à lui seul assouvir le désir. Une femme qui se contenterait de la torpeur vaginale est amenée à sombrer dans un état d’irritabilité permanent qui se traduira le plus souvent par de subites sautes d’humeur ou de violentes, d’inexplicables crises de larmes. Les sexologues conseillent donc aux femmes de compléter le plaisir de la pénétration par la masturbation. Car selon une loi physiologique immuable, les deux plaisirs ne peuvent se concevoir en même temps. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’ils sont régis par deux systèmes nerveux antagonistes : l’ortho et le parasympathique.

La conséquence est irrévocable : plus vous exciterez le clitoris et plus vous inhiberez le plaisir vaginal. Il n’est qu’à voir l’assèchement brutal du vagin dans le cas de caresses clitoridiennes prolongées pour se convaincre de cette règle élémentaire.

Dans une écrasante majorité des cas — le vagin n’étant que très faiblement innervé — le plaisir clitoridien prédomine sur les sensations provoquée par la pénétration. Et la femme peut supporter (apprécier ?) le sexe de l’homme dans son vagin tout en se livrant exclusivement au plaisir clitoridien. Elle peut alors donner l’impression de jouir vaginalement… 

 

Traditionnellement, on a convenu de différencier les deux plaisirs, respectivement clitoridien et vaginal.

 

Le plaisir au degré supérieur

Mais enfin, quand on sait que le premier des organes sexuels, c’est le cerveau, tous les espoirs sont permis, aussi bien aux maladroits qu’aux déçues. Beaucoup de femmes comblées ne cherchent pas trop à analyser si leur plaisir est venu par telle voie plutôt que par telle autre, si elles ont ressenti le plaisir en quatre secousses plutôt qu’en six, les plus fortes plutôt au début. Plutôt au milieu ou plutôt à la fin. Plutôt en avant ou plutôt en arrière. 

Si elles ont envie de remettre ça ou pas… Ces bienheureuses se laissent porter par leurs pures sensations et oublient tout le reste, déconnectées, se livrant au plaisir sans rien attendre d’autre. Car toute attente met dans un état de tension a priori incompatible avec l’abandon total, la confiance, condition absolue d’un degré réellement supérieur du plaisir.

Là, les sensations sont bien impossibles à définir, la volupté touche le corps tout entier, les vibrations vagabondent et le corps perd ses limites, ses frontières, la propre perception de ce qu’il est, d’où il est, de ce qu’il fait et même de ce qu’il ressent. Serait-ce trop dire que la montée le mène à une sensation quasiment cosmique d’unisson avec tout ce qui en ce monde n’est guère définissable ? On pourrait appeler ça l’orgasme total. On voudrait que ça ne s’arrête jamais. On a marché sur la terre des dieux.

Source : La sexualité humaine, recherches comportementales, sociales, culturelles.

 

leplaisir>  L’orgasme selon Freud,
foutaises traumatiques

Le bon vieux Sigmund Freud prétendait qu’il existe deux types d’orgasme : l’orgasme clitoridien et l’orgasme vaginal. Et puisqu’il n’en était pas à une ânerie près à ériger en dogme, il affirma doctement que l’orgasme vaginal ne pouvait être connu que par des femmes d’âge mûr. En clair, pour l’ami Freud, la sexualité d’une femme s’épanouit au fil du temps du clitoris au vagin, laissant les plus jeunes dans l’attente d’un plaisir mystérieux qui leur sera « miraculeusement » accordé, un jour, par un amant supposé plus doué que les autres. Le sous-entendu est évident tout autant que pervers : une fille ne devient femme que lorsqu’elle éprouve enfin la jouissance sans avoir besoin de stimuler son clitoris. Ce mythe de l’orgasme vaginal — tout particulièrement depuis que on étudie Freud en cours de philosophie dans les classes de terminale — semble avoir perturbé, voire traumatisé, plus d’une génération de jeunes filles.

Vous devez être connecté pour poster un commentaire Connexion